mardi, janvier 20, 2015

Un sueño


Un sueño en otro, de Andrés Trapiello




No se nota algo como la sencillez, por lo tanto se puede, a primera vista, creer que con un léxico común no se puede alcanzar picos metafísicos. Este poemario necesita, de parte del lector, leer y leer de nuevo los poemas. A tientas, Andrés Trapiello desdibuja su propia vía, su íntimo no revelado inmediatamente. Una lectura a ciegas, olvida lo esencial, el sueño y la vida: ”¿Quién no ha temido que la vida fuese/ un sueño extraño que se vierte en otro,/ como matrioscas rusas, este sueño/ no menos irreal o melancólico ?”
Desde el principio Andrés Trapiello pone las reglas y la temática, después hay que seguir este viaje en el hondo abismo del ser. Cada uno, a lo mejor, encuentra una voz en sus entrañas, en sus sesos, en todo el cuerpo.
Además la pregunta queda molestándonos, porque de este cuerpo, de esta vida, sabemos poco, casi nada.
Pero ofrecer la palabra a su ser entero perdido en un universo tan inmenso nos permite imaginar una salida.
No es un poemario de afirmación sino más bien el dudo siempre renovado. ¡Vuelva a leer otra vez!
François Szabó

Un sueño en otro, Andrés Trapiello, Tusquets Editores, 2004

jeudi, janvier 15, 2015

"Le Chien de Goya" d'Emmanuel Merle, poésie

Emmanuel Merle Le chien de Goya
Emmanuel Merle, Le chien de Goya


Le Chien de Goya fait partie des Peintures Noires, ensemble de 14 panneaux peints directement sur les murs de la Quinta del sordo, la maison de l’artiste, sur les rives du Manzanares.
Ce tableau [huile sur plâtre, transféré sur toile et qui se trouve maintenant au Prado], le dernier de la série, réalisée entre 1820 et 1823, a inspiré voire fasciné bien des artistes à la fois au niveau de la réalisation [entre abstraction et figuration] et de l’interprétation [solitude de l’homme, angoisse métaphysique]. Il a notamment irrigué une grande partie de l’œuvre de Antonio Saura qui y voyait l’expérience même de la création artistique.
La beauté de la réalisation plastique – les différents plans, les couleurs — est présente dans le poème d’Emmanuel Merle.
Mais le poète, dans une langue épurée, s’attache surtout à traduire l’inexprimable, et à saisir dans un mouvement fluide et enveloppant l’homme-Goya [enfermé dans sa surdité], son geste de peintre, le chien [à moitié enseveli], nous qui le regardons, et, comme dans un miroir, nous ne nous voyons plus que dans son œil qui exprime tout le tragique de notre condition humaine.
Je ne peux que vous engager à lire et à relire en boucle, comme je l’ai fait, ce magnifique poème. Il va à l’essentiel et il a un souffle qui nous emporte avec force et émotion jusqu’au dernier vers.
Emmanuel Merle a publié des nouvelles et des articles dans différentes revues [en France et à l’étranger]. Il est surtout l’auteur de recueils de poésie édités entre autres chez Gallimard, Pré Carré Sang d’Encre, La Passe du vent. Certains ont été primés : Prix Théophile Gautier pour Amère Indienne [2007], Prix Rhône-Alpes pour Un Homme à la mer [2008].
Le Chien de Goya vient d’être édité en octobre 2014 par les Éditions Encre et Lumière de Jean-Claude Bernard.
Le livre-objet, beau et sobre, est en harmonie avec la parole du poète, sur les pages le poudroiement d’or faisant écho à la lumière du tableau et la ligne brune à ses sables obscurs.


Avec l’autorisation du poète et celle de l’éditeur, je vous cite quelques extraits pour vous donner envie de découvrir le Chien de Goya d’Emmanuel Merle.
Le chien de Goya n’aboie plus,
son maître est sourd.
Ne plus entendre - le son est noir -
le cri du chien, c’est renoncer
à prononcer l’espoir.

L’aboi s’est dissous dans le brun,
il colore le tableau, et le ciel
est aux abois sombres de la nuée.
Sur le mur il y a des traces,
des mots difformes qu’un sourd
a jetés comme des crachats,

des mots de brute.
[page 7]




Peintre de chasse, comme on le dit d’un chien,
que chasses-tu qui maintient ta tête en arrêt
au-dessus du rien noir et mouvant ?

Le corps se débat, et c’est le cœur qui bat.

Mais l’œil guette, se tend toute la tête.
Corps sous la vase, peintre sourd,
que vois-tu, de ton regard simple ?

Le corps se débat,
le cœur bat,
l’œil.
[page 15]




On croirait que le soleil a trahi,
que la promesse de vie qu’abritait
la couleur irradie de la douleur
du feu le plus brûlant.

Qui tient ce pinceau qui étouffe
d’or nocturne, et qui en épaissit
le monde ?
Ce brun d’or, cet orage.

Rideaux sonores d’un déluge intérieur.
[page 23]



Animal, d’où vient que ni le mal ni le bien
ne font signe autour de toi, qui te noies
presque, toi qui juste avant n’aboies pas ?

Au fond, peut-être ne fais-tu que naître,
et ce cri que l’on attend
un autre l’a poussé que l’on n’entend plus.

Le ciel est un pan de mur jaune,
sans jugement, sans murmure.
[page 43]



Rythme sur le mur, musique intérieure,
voici le chant du sang, violoncelle
étrangement palpitant dont le son
d’or violent entoure la main qui peint.

Enfermé dans le tombeau du corps,
voici un bruit excisé comme une pierre,
et qui résonne là, dehors,

La couleur se fait entendre,

un chien, aussi bien une âme
sous l’archet.
[page 47]



Simple comme la nuit,
sans mots,
Le chien de Goya,
seul regard humain
sur les murs de la maison du sourd
[page 53]

Par Josiane Gourinchas, Traductrice